Dans l’Inde classique ou médiévale, en général seuls les hommes pratiquaient le yoga. Les choses commencèrent malgré tout à changer un peu avec l’apparition des courants tantriques (autour du 5è siècle de notre ère). Avec l’arrivée de ceux-ci, certaines femmes au moins pouvaient pratiquer et/ou transmettre des préceptes « yogiques » particuliers ; nous parlerons de cela en détails à une autre occasion.
Dans la vision religieuse et orthodoxe (védique), le devoir d’une femme était d’être une bonne épouse et une bonne mère. Une des manières à travers laquelle une femme pouvait atteindre la libération consistait à aider son mari à atteindre la libération. Une autre manière était que l’un de ses fils trouve la libération. La femme n’avait donc pas d’autre option que celle de servir les hommes. Il était quasiment impossible pour une femme de suivre un chemin ascétique, car cela signifiait abandonner son dharma.
Le renoncement était accepté pour les femmes âgées, seules, veuves, celles souffrant de handicaps physiques ou ne pouvant pas être mariées. C’est-à-dire pour toutes les femmes qui « n’appartenaient » pas à un homme (c’est encore vrai aujourd’hui).
C’est de cette manière que nous arrivons à l’histoire de Lalla, née vers 1320, d’une famille brahmane cultivée, obligée de se marier à 11 ans à un homme plus âgé. Elle souffre d’un mariage malheureux, pour des raisons évidentes. Initiée très tôt aux enseignements du shivaïsme tantrique du Cachemire, elle part, à la mort de son mari, nue, « vêtue d’espace », danser sur les chemins du Cachemire, rejetant toutes les conventions.
De nombreux récits témoignent de son courage, de sa détermination ainsi que des siddhi, pouvoirs magiques, que son ascèse intense lui a permis de maîtriser. Au-delà des limitations du mental et du petit-soi, elle invite à se reconnaître comme étant le Soi, atman, identique au tout, Shiva.
Les quatrains de Lalla, qui était une grande poète, rendent compte d’une intense pratique du yoga tantrique : maîtrise des souffles vitaux, activation des cakra, éveil de la kundalini, flot d’ambroisie…Libre et passionnée, la yogini s’affranchit des codes et des interdits de la société brahmanique.
Lalla fait figure d’exception : si les quelques références dans les textes indiquent que des femmes pratiquèrent effectivement le yoga, leur rareté suggèrent aussi leur petit nombre.
Quel contraste avec ce qui se passe aujourd’hui dans le monde moderne, où la pratique du yoga est très largement dominée par les femmes !
Nous vous laissons avec l’un des poèmes écrit par Lalla. A travers celui-ci, on peut commencer à percevoir l’état d’extase et le niveau d’union avec la conscience universelle qu’elle réussit à atteindre :
« Le tantra disparu, reste alors le mantra
Le mantra disparu, reste alors la pensée,
La pensée disparue, alors, plus rien nulle part.
Dans le Vide un vide s’est absorbé » (121)
Sources : plusieurs articles tirés de Yoga, l’encyclopédie, sous la direction de Ysé Tardan-Masquelier (Judit Törzsok, Lilian Cattalano, Daniela Bevilacqua)
Bonjour,
Je me permets de vous contacter car à travers mes recherches, je suis tombée sur votre article.
Je ne sais pas pourquoi quelque part dans mon esprit, j’ai cru un jour entendre parlé d’un récit ou un père après avoir essayé d’instruire chacun de ses fils en vain, avez finit par transmettre oralement ses connaissances à sa fille qui fut la seule capable de les retransmettre.
Malheureusement les personnes qui je pensais m’avait parlé de ce texte me disent ne pas le connaître. Alors est-ce le fruit d’une recomposition mental de ma part ? Peut-être.
Je vois cependant que vous écrivez ici « certaines femmes au moins pouvaient pratiquer et/ou transmettre des préceptes « yogiques » particuliers ; nous parlerons de cela en détails à une autre occasion. ».
J’ai regardé mais je ne vois pas d’autres articles à ce sujet. Vous serez t’il possible de me communiquer plus d’informations, peut-être par mail? Afin que je puisse orienté plus précisément mes recherches.
Merci d’avance pour votre aide.
B.
Bonjour Benoite, je viens de vous répondre par mail. Bonne journée, Frédérique